Les problèmes qui touchent le plus directement notre conscience de notre propre vie, de leurs droits et de leurs limites, de nos devoirs à l’égard de la société et de leurs limites ne trouvent pas de réponses suffisantes dans la loi, encore moins dans la parole des gouvernants. La preuve en est que les réflexions et les débats qui se forment autour d’un cas aboutissent souvent à transformer la loi.
Nous en avons fait l’expérience à propos du droit à l’avortement, du port du voile islamique à l’école, du droit des homosexuel(le)s au mariage et à la filiation. Nous n’en avions pas encore la démonstration à propos de la fin de vie volontaire et du rôle que peuvent y occuper les médecins.
Avec une rapidité et une radicalité qui ont surpris nous venons, nous, peuple français, au nom duquel le jury de Pau a pris sa décision d’aller à l’essentiel, au-delà de la loi Leonetti et d’arguments de tous ordres et qui méritent tous réflexions : nous avons rappelé que, derrière la complexité de chaque affaire, il ne fallait pas perdre de vue que le peuple français manifeste depuis longtemps sa forte conviction que chaque être humain doit pouvoir choisir, s’il le veut, les conditions de la fin de sa vie, c’est-à-dire de sa mort.
Le procureur, le juge, le jury, les témoins, en particulier médecins locaux, les penseurs invités à s’exprimer ont reconnu que le docteur Bonnemaison avait commis des fautes et que ce n’est pas sans raison que certains l’avaient accusé et voulaient le condamner mais que c’est lui, chargé de transgression, qui a le mieux entendu notre demande, que nous formulions souvent mal, mais où nous engagions notre conception de nous-mêmes comme êtres libres, responsables et dont la dignité doit être respectée.
La grandeur du jugement émis est qu’il n’a pas cherché à faire la part de la chèvre et du chou et qu’il a déclaré le docteur Bonnemaison, accusé de sept assassinats, innocent. Ce jugement affirme, ce jugement rend clair que les lois, les gouvernants et les professionnels devront entendre notre attachement fondamental au respect de la conscience humaine, car c’est lui qui est le principe dont toutes les institutions démocratiques tirent leur force et dont nous savons par expérience qu’il peut déplacer les montagnes avec plus de force que toutes les formes de conscience identitaire.